Les nocturnes
A Paris la grand'ville
Des ombres vont la nuit
Qui se faufilent
Le long des murs sans bruit
Là, sous la lanterne aux feux rouges
Faisant les cent pas
Les braves agents
Surveillent les bouges
Dans le service on ne blague pas
D'autres sous leur capuchon
Par deux, dans la nuit, s'en vont
Ce sont les nocturnes
Les papillons de nuit
Qui veillent pour qu'on ne fasse pas de bruit
Quand le bourgeois roupille dans sa turne
S'ils sont taciturnes
Sous les plis d'leur manteau
C'est qu'ils risquent souvent leur peau
Les nocturnes
Des fêtards en ribote
Rigolant d'un biffin
Qui, sous sa hotte
S'en va l'crochet en main
Le biffin, d'un air philosophe
S'éloigne et s'en fout
Car ils craignent pas les catastrophes
Tous les ceusses qu'a pas le sou
Fêtard, ne rigole donc pas
Tu n'sais pas c'que tu deviendras
Ce sont les nocturnes
Les papillons de nuit
Un métier qu'au jour d'aujourd'hui
On en crève de faim dans sa turne
Ils pensent taciturnes
Devant les trous de leurs ribouis
Qu'tout l'monde peut pas être verni
Les nocturnes
Le long des sombres berges
Où de pâles falots
Semblent des cierges
Reflétés par les flots
Des ombres s'en vont, tête basse
Si lasses de souffrir
Que, vers l'eau profonde qui passe
Elles viennent en finir
Quand on est trop las de lutter
Un soir, on n'a qu'à sauter
Ce sont les nocturnes
Les papillons de nuit
Recélant les bonheurs détruits
Leurs cœurs sont de funèbres urnes
Ils vont, taciturnes
Là-bas, vers les flots noirs
Où sombrent les grands désespoirs
Les nocturnes
Devant la porte sombre
De la vieille prison
Des gens dans l'ombre
Descendent d'un fourgon
Soudain la sinistre machine
Se dresse dans la nuit
Deibler monte sa guillotine
Lentement, sûrement, sans bruit
Dans un silence profond
La foule observe ce qu'ils font
Ce sont les nocturnes
Les papillons de nuit
Sous le couteau d'acier qui luit
Ils poussent une ombre taciturne
Une tête, dans l'urne
Tombe bientôt, sans un cri
Ils opèrent sans faire de bruit
Les nocturnes
Las nocturnas
En París, la gran ciudad
Las sombras van de noche
Que se deslizan
A lo largo de los muros sin ruido
Allí, bajo la linterna de luces rojas
Dando vueltas
Los valientes agentes
Vigilan los antros
En el servicio no se bromea
Otros bajo sus capuchas
De dos, en la noche, se van
Son las nocturnas
Las mariposas nocturnas
Que velan para que no hagan ruido
Cuando el burgués duerme en su torre
Si son taciturnos
Bajo los pliegues de sus capas
Es porque a menudo arriesgan sus vidas
Las nocturnas
Los juerguistas en la juerga
Riéndose de un pobre diablo
Que, bajo su capucha
Se va con el gancho en la mano
El pobre diablo, con aire filosófico
Se aleja y le importa un bledo
Porque no temen las catástrofes
Todos aquellos que no tienen dinero
Juerguista, no te rías
No sabes en qué te convertirás
Son las nocturnas
Las mariposas nocturnas
Un oficio que hoy en día
Se muere de hambre en su torre
Piensan taciturnos
Frente a los agujeros de sus bolsillos
Que no todos pueden ser afortunados
Las nocturnas
A lo largo de las sombrías orillas
Donde las débiles antorchas
Parecen velas
Reflejadas por las olas
Las sombras se van, con la cabeza baja
Tan cansadas de sufrir
Que, hacia el agua profunda que pasa
Vienen a terminar con todo
Cuando uno está demasiado cansado de luchar
Una noche, solo tiene que saltar
Son las nocturnas
Las mariposas nocturnas
Guardando los sueños destruidos
Sus corazones son urnas fúnebres
Van, taciturnos
Allá, hacia las aguas oscuras
Donde se hunden las grandes desesperanzas
Las nocturnas
Frente a la puerta oscura
De la vieja prisión
Personas en la sombra
Bajan de una furgoneta
De repente la siniestra máquina
Se alza en la noche
Deibler sube su guillotina
Lentamente, seguramente, sin ruido
En un silencio profundo
La multitud observa lo que hacen
Son las nocturnas
Las mariposas nocturnas
Bajo el cuchillo de acero que brilla
Proyectan una sombra taciturna
Una cabeza, en la urna
Pronto cae, sin un grito
Operan sin hacer ruido
Las nocturnas