395px

Dios Que Duerme

Félix Leclerc

Dieu Qui Dort

Aube qui luit
Jour qui plie
Nuit qui suit
Temps qui fuit

Blé qui meurt
Loup qui mord
Fille qui pleure
Dieu qui dort

Si tu voulais m'attendre un instant seulement
Déposer ton bonhomme à quelque carrefour
Que je lui parle en homme, un matin au détour
Je te demande en somme un arrêt dans le jour

Si tu voulais descendre que je te voie de près
Si tu voulais m'entendre , moi qui te crie après
Depuis que je te suis, depuis que j'ai la vie
Doute-toi donc un peu que je suis malheureux

Mais tu dors
Tu m'ignores
Tu es fort
Tu as tort

Orgueilleux
Vent de glace
On te veut
Tu t'effaces

Tu marches sur les eaux, tu coupes les orages
Mes doutes, mes naufrages, tu les as dans le dos
Suppose que mes rages proviennent de ton jeu
Mais lâche un peu le large, et descends dans mon creux

J'aurais été ton chien, l'ombre de ton tilleul
Ton bien, ton pain, ta main, ton verre et ton filleul
Mais tu t'en vas tout seul et je n'existe pas
Pas plus que la meule au fond d'un débarras

C'est fini
J'ai compris
Insoumis
Moi aussi

Serai roi tout-puissant, solitaire et méchant
Distributeur de feu, maître des firmaments
Avec des légions de démons-cavaliers
Qui te secoueront et te feront trembler

Si tu viens
Serai rien
Que la trace
Sous ton pied

Si tu viens
Serai rien
Que du sable
Dans ta main

Dios Que Duerme

Amanecer que brilla
Día que se dobla
Noche que sigue
Tiempo que huye

Trigo que muere
Lobo que muerde
Niña que llora
Dios que duerme

Si quisieras esperarme solo un instante
Dejar a tu muñeco en alguna encrucijada
Para que le hable como un hombre, una mañana al doblar la esquina
Te pido en resumen una parada en el día

Si quisieras bajar para verte de cerca
Si quisieras escucharme, yo que te grito
Desde que te sigo, desde que tengo vida
Duda un poco que estoy infeliz

Pero tú duermes
Me ignoras
Eres fuerte
Estás equivocado

Orgulloso
Viento helado
Te queremos
Te desvaneces

Caminas sobre las aguas, cortas las tormentas
Mis dudas, mis naufragios, los tienes a tus espaldas
Supón que mis rabias provienen de tu juego
Pero suelta un poco el timón, y baja a mi abismo

Hubiera sido tu perro, la sombra de tu tilo
Tu bien, tu pan, tu mano, tu vaso y tu ahijado
Pero te vas solo y yo no existo
No más que la muela en el fondo de un trastero

Se acabó
He entendido
Indómito
Yo también

Seré rey todopoderoso, solitario y malvado
Distribuidor de fuego, dueño de los firmamentos
Con legiones de demonios-jinetes
Que te sacudirán y te harán temblar

Si vienes
Seré nada
Sólo la huella
Bajo tu pie

Si vienes
Seré nada
Sólo arena
En tu mano

Escrita por: