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Elisabeth Martin

Tom Poisson

Elisabeth Martin

Quand vous lirez cette lettre, je serai mort,
Je viens d'avoir trente ans et plus vraiment toutes mes dents
J'ai tenté d'être heureux, j'ai parfois pensé l'être,
Ces fois où le soleil réchauffait assez mon corps,
Une fois ou deux au moins le soleil brilla au dehors.

Y faut pas m'en vouloir si j'ai pris le large,
Moi j'en veux à personne même si je finis dans une décharge,
J'étais trop essoufflé pour continuer,
Même en peinture je ne pouvais plus encadrer mon quartier,
De toute façon mon corps pesait trop lourd pour mes pieds.

J'pense à Elisabeth Martin,
A son sourire en coin, dans la cour de l'école,
Qui a fait exploser un matin
Mon coeur de p'tit garçon qui aimait pas l'école.

J'pense à Elisabeth Martin,
A son goût à la menthe, dans la cour de l'école,
Au baiser donné un matin
Au p'tit garçon que j'étais dans la cour de l'école.

Vous allez vous poser des tas de fausses questions;
Pas besoin de remords ni même de culpabilité,
J'ai un peu aimé, moins que vous sans doute,
Mais dans la vie, n'est-ce pas, faut aimer coûte que coûte,
Dans la vie faut aimer même si ça fait mal et que ça coûte.

Je n'ai pas contrôlé mon histoire mais j'ai choisi sa fin,
Très vite j'ai bien senti que pour moi ce serait un peu compliqué,
Et maintenant que je glisse dans un sommeil profond,
Je repense à mes débuts , à celle qui m'a fait croire
Pendant un court instant que la vie coulerait amoureusement.

J'pense à Elisabeth Martin,
A ses collants en laine, dans la cour de l'école,
A nos départs main dans la main,
Comme si nous étions tombés dans le même pot d'colle

J'pense à Elisabeth Martin,
Pas ma mère , pas mon frère, pas ma maîtresse d'école,
Celle qui a plongé un matin,
Sa bouche et sa langue dans ma bouche à l'automne.

Elisabeth Martin

Cuando leas esta carta, estaré muerto,
Acabo de cumplir treinta años y ya no tengo todos mis dientes,
Intenté ser feliz, a veces pensé que lo era,
Esos momentos en los que el sol calentaba lo suficiente mi cuerpo,
Al menos una o dos veces el sol brilló afuera.

No me culpes si me fui lejos,
No le guardo rencor a nadie aunque termine en un basurero,
Estaba demasiado cansado para seguir adelante,
Incluso en pintura ya no podía soportar mi barrio,
De todas formas, mi cuerpo pesaba demasiado para mis pies.

Pienso en Elisabeth Martin,
En su sonrisa traviesa en el patio de la escuela,
Que un día hizo estallar
Mi corazón de niño que no amaba la escuela.

Pienso en Elisabeth Martin,
En su sabor a menta en el patio de la escuela,
En el beso dado una mañana
Al niño que era en el patio de la escuela.

Se harán un montón de preguntas equivocadas;
No hay necesidad de remordimientos ni de culpabilidad,
Amé un poco, quizás menos que ustedes,
Pero en la vida, ¿no es cierto que hay que amar cueste lo que cueste?,
En la vida hay que amar aunque duela y cueste.

No controlé mi historia pero elegí su final,
Pronto sentí que para mí sería un poco complicado,
Y ahora que me deslizo en un profundo sueño,
Recuerdo mis comienzos, a aquella que me hizo creer
Por un breve instante que la vida fluiría amorosamente.

Pienso en Elisabeth Martin,
En sus medias de lana en el patio de la escuela,
En nuestras despedidas tomados de la mano,
Como si hubiéramos caído en el mismo pegamento.

Pienso en Elisabeth Martin,
No en mi madre, no en mi hermano, no en mi maestra,
Aquella que un día,
Hundió su boca y su lengua en la mía en otoño.

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